le 3 avril 2022, Hôtel de Soubise - Archives Nationales (Paris)
Concert : Clavecin en partage
Hôtel de Soubise
Archives nationales 60 rue des Francs Bourgeois
75003 Paris
Dimanche 3 avril 2022 à 12h30
Attention, nombre de places limité, pas de réservation possible.
Concert à entrée libre offert bénévolement par les artistes, dons destinés à soutenir les projets portés par Clavecin en France.
Tous les matins réveil à six heure vingt. Pendant 3 ans mes journées commencent au lycée, donc très mal. Mais il y avait un compère de galère à qui je racontais quotidiennement les cours avec Blandine, les concerts de Pierre ou de Leonhardt, le mésotonique de Frédéric, le Ruckers de Boulogne....
Bah c’est Guillaume, dont on fête le premier clavecin aujourd’hui. Vous allez voir ce que vous allez voir !
Clavecin de Guillaume Zellner, 2022, d’après Andreas Rückers, Anvers 1644, musée Vleeshuis, Anvers (inv. VH.2137). Décorations : Jean-François Brun.
clavecin à un clavier de 45 notes (C/E – c’’’ avec octave courte), un jeu de huit pieds et un jeu de quatre pieds, jeu de luth divisé en basse et dessus (brisure au f#’).
Programme :
Marco Focoli (ca 1540-1585)
Napolitana
Orlando Gibbons (1583-1625)
Fantasia 5
Jacques Champion de Chambonnières (1601-1672)
Gaillarde
Antonio de Cabezón (1510-1566)
Canción glosada Triste départ (Nicolas Gombert)
Juan Cabanilles (1644-1712)
Passacalles
Jan Pieterszoon Sweelinck (1562-1621)
More Palatino
Girolamo Frescobaldi (1583-1643)
Capriccio Sopra la bassa Fiamenga
Giovanni de Macque (1550-1614)
Capriccio sopra re fa mi sol
Girolamo Frescobaldi (1583-1643)
Cento partite sopra passacagli
Le choix du clavecin d’Andreas Ruckers de 1644 conservé au musée Vleeshuis à Anvers comme modèle pour la fabrication d’un premier instrument s’est imposé assez rapidement comme une évidence, pour des raisons aussi bien pratiques qu’esthétiques. Il me semblait logique de commencer par un modèle à un clavier, plutôt petit et d’un plan relativement simple plutôt que de s’attaquer tout de suite à de grands instruments ; commencer par étudier la facture flamande du XVIIe siècle, c’est-à-dire une école régionale qui a considérablement influencé toute l’Europe du Nord, aussi bien en France qu’en Angleterre ou même en Allemagne, paraissait aussi une meilleure approche pour comprendre l’évolution des principes de construction du clavecin.
L’histoire et la production de la dynastie des Ruckers est abondamment documentée, aussi bien par des ouvrages et des articles scientifiques que par des catalogues et des plans d’instruments ; instruments dont un grand nombre issus de leurs ateliers sont parvenus jusqu’à nous, bien que transformés pour la plupart à des époques postérieures à leur fabrication. Parmi eux, le clavecin de 1644 conservé à Anvers, même s’il a subi également des transformations importantes, réunit assez d’éléments pour reconstituer son état d’origine. Une autre caractéristique propre aux instruments des Ruckers est qu’ils ont toujours gardé une structure commune tout en proposant de nombreuses variantes à travers différents modèles. Ainsi, plusieurs clavecins très proches de celui que j’ai copié sont conservés. Il semblait donc possible de se rapprocher au plus près des instruments originaux en recoupant l’ensemble des informations disponibles.
Paradoxalement, même si cette école flamande a été profondément étudiée et semble aujourd’hui bien connue, j’avais été surpris de constater qu’il existait relativement peu de copies exactes de ces instruments anversois, en tous cas en France : mis à part une copie réalisée par Christopher Jones que possède le conservatoire de Paris et qui m’avait beaucoup impressionné durant mes études, tous les instruments que j’avais pu voir différaient du modèle dont ils s’inspiraient soit par leur étendue, soit par le nombre de jeux, soit dans certains détails de fabrication.
Habitudes d’atelier de la part des facteurs, exigences des musiciens pour leur confort de jeu, incompréhension de certains détails apparemment anecdotiques sur les clavecins originaux, ou crainte de produire un instrument à l’étendue et au répertoire trop restreints, j’ignore quelles en sont les raisons. Quoiqu’il en soit, ne faire « que » reproduire le plus exactement possible et sans aucune concession un modèle original me semblait encore la démarche la plus simple à adopter et, aussi surprenant que cela puisse paraître, la moins employée dans la production actuelle. Plus encore, réaliser un clavecin de cette façon s’est imposé rapidement comme une nécessité afin d’avoir ensuite un point de départ sur lequel baser mon travail pour l’élaboration d’instruments futurs.
Enfin, la fascination qu’a exercé, dès ma première rencontre avec ce répertoire, l’écriture polyphonique, depuis les motets de Johannes Ockeghem et de Josquin jusqu’aux variations sur les Psaumes de Jan Pieterszoon Sweelinck, l’éblouissement qu’avaient provoqué les décors des clavecins anversois, d’une grande simplicité de lecture et néanmoins d’une somptuosité à la limite de l’ostentatoire, toute l’imagerie associée à l’univers culturel dans lequel s’est déployée cette école de facture, comme les intérieurs des demeures patriciennes tendues de cuir repoussé, dallées de marbre noir et blanc et meublées de chêne massif que l’on retrouve aussi bien dans les musées d’Anvers que dans la production picturale flamande et hollandaise, ne pouvaient que m’inciter à construire un instrument qui puisse traduire et mettre en valeur le mieux possible la production artistique, artisanale et intellectuelle de cette époque.
Je ne peux terminer cette présentation de mon travail sans remercier les personnes qui m’ont aidé et encouragé durant la construction de ce clavecin : toute ma famille et Jean-Luc en premier lieu, Jean-François Brun pour la réalisation magnifique du décor et son soutien sans faille durant les derniers réglages de l’instrument. Parmi les nombreux facteurs qui ont bien voulu répondre à mes innombrables questions, je tiens à remercier particulièrement Christopher Jones pour ses conseils au démarrage de ce projet. Enfin, ce clavecin n’aurait jamais pu arriver à son aboutissement sans les conseils d’Émile Jobin, dont les instruments et la manière d’envisager son métier ont été une inspiration constante depuis l’éveil de ma première curiosité dans ce domaine jusqu’à aujourd’hui.
G. Zellner
Jean-Luc Ho
Jean-Luc Ho étudie le clavecin, l’orgue et le clavicorde. Aujourd’hui musicien de claviers, il se produit principalement en récital. Sa discographie est fidèle à son amour quotidien pour Bach, Couperin, Byrd, Sweelinck…
Son attention pour les instruments et les ateliers de facture le conduisent aussi bien à s’impliquer dans la renaissance d’un orgue castillan de 1768 (aujourd’hui à Fresnes) qu’à former sa propre collection d’instruments.
Artiste-résident du Festival Bach en Combrailles (2017-2020) et de la Fondation Royaumont (2018-2021), il enseigne depuis cette année l’accord et les tempéraments au CNSMD de Paris.
Avec Guillaume Prieur, il est organiste-adjoint de l’orgue historique de la collégiale de Dole, dont le titulaire est Pierre Pfister.
Guillaume Zellner
Après des études de musicologie et d’organologie au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris, Guillaume Zellner s’oriente vers la facture instrumentale, d’abord grâce à un apprentissage en facture d’orgues chez Bertrand Cattiaux puis un séjour de trois ans en Angleterre chez Goetze & Gwynn. C’est principalement dans cet atelier spécialisé dans la restauration des orgues anciennes qu’il apprend l’essentiel des techniques traditionnelles et artisanales nécessaires à la construction d’instruments fondés sur des modèles anciens. De retour en France en 2016, il installe son atelier pour se consacrer à la restauration et à la construction de clavecins, tout d’abord dans le sud de l’Alsace, puis à Phalsbourg, entre Strasbourg et Nancy, depuis 2020.
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