Visite à la Bibliothèque Nationale

Samedi 26 Janvier 10h 30-12h, Bibliothèque Nationale, département musique.

Pour les adhérents à l’association, nous avons proposé une visite à la Bibliothèque Nationale de France à Paris, département de musique :

Découverte de manuscrits rares français, visite dirigée et commentée par Catherine Massip,

Le manuscrit Bauyn

http://www.bnf.fr/pages/collections...


Le samedi 29 janvier 2008 un certain nombre d’entre nous ont été très gracieusement reçus par Catherine Massip au Département de la Musique de la Bibliothèque Nationale. Généreuse de son temps et de son savoir, elle nous a fait la visite d’une partie du département, puis nous a montré des manuscrits de la réserve.

En imaginant que nous connaissions tous la grande salle de lecture, nous avons commencé notre visite par une plus petite salle, utilisée pour la lecture et la photocopie des microfilms, et d’ores et déjà utilisée également pour les recherches informatiques. Petit à petit, les catalogues, les collections et les partitions seront « digitalisées », mises parfois sur Internet également, et donc accessibles à un très grand nombre de chercheurs, musicologues, et musiciens.

Madame Massip, répondant à nos questions, a décrit la politique actuelle du département, et a confirmé que la copie (photocopie ou copie à la main) des documents de l’époque est parfaitement légale et utilisable en édition, avec quelques réserves seulement.

Nous sommes descendus ensuite dans une salle proche de la réserve, où nous avons passé près de deux heures devant les manuscrits des œuvres pour clavecin. Avant de nous les montrer, Madame Massip nous a parlé des problèmes auxquels sont confrontés régulièrement les musicologues : problèmes de datation des manuscrits, de l’usure des livres, de la dégradation naturelle des manuscrits à cause de l’encre qui, acide de nature, traverse le papier et rend même parfois les textes illisibles. Nous ne pouvions qu’admirer la patience avec laquelle certaines personnes travaillent pendant des années pour trouver des partitions, les comparer, et souvent les éditer à l’usage des interprètes, et pour établir les catalogues qui nous permettent de trouver de la belle musique à jouer.

Nous sommes arrivés enfin aux manuscrits. Nous avons commencé par celui qui est le plus beau de tous : le manuscrit Bauyn, qui contient surtout les œuvres de Louis Couperin. L’objet en lui-même est superbe, avec une reliure de toute beauté. A l’intérieur un des plus beaux exemples de calligraphie musicale, de toute évidence un « travail d’amour ». Quand on ne connaît que les facsimile, on ne peut pas imaginer à quel point l’original les dépasse en élégance et en clarté.

Le manuscrit Bauyn, qui mesure 39 par 26,5 centimètres, est nettement plus grand que les facsimile, et l’écriture musicale y est très claire. Cela nous a permit de constater avec chagrin que les éditeurs ont beaucoup de mal, pour des raisons financières surtout, à rendre justice aux manuscrits. Nous avons regardé évidemment les courbes et les lignes de phrasé dans les préludes non-mesurés. Et après un certain temps d’émerveillement, nous nous sommes penchés sur LE célèbre la-bémol du Prélude en Fa, qui est sans aucun doute un la-bécart. C’était assez drôle de nous voir nous extasier sur un tout petit point de détail, avec à côté des centaines de belles pages, mais on a trouvé la réponse à une question d’interprétation non dénuée interêt.

Au passage, nous avons remarqué que les professeurs actuels ont passé pas mal de temps à faire des recherches pour trouver des partitions, pour les éditer aussi, et que la jeune génération bénéficie de ce travail déjà fait. On peut regretter que les jeunes clavecinistes ne connaissent pas autant les arcanes et les plaisirs de la recherche.

Nous avons ensuite passé en revue plusieurs manuscrits, tous aussi fascinants, même s’ils n’avaient pas la beauté du Bauyn. Nous avons remarqué en particulier un manuscrit de Geoffroy, écrit en tout petit mais très intéressant musicalement. On a emis le souhait et l’espoir de mettre une copie d’une partie de cette œuvre sur le site du CLEF.

Il y avait aussi un manuscrit de virginalistes, le Parthenia, une des toutes premières œuvres pour clavecin et qui contient l’original d’une image que tout le monde connaît : une femme assise à un virginal. On a parlé, évidemment, de la position de ses mains sur l’instrument...

Nous avons vu ensuite un cahier très intéressant datant du 18e siècle. Madame Massip nous a fait remarquer qu’une première personne a copié de la musique pour une jeune élève ; quelques années plus tard, le papier étant cher à l’époque, une autre a copié des pièces pour un autre élève, mais en retournant le cahier à l’envers et en commençant à l’autre bout. Dans ce cahier on a remarqué des variations d’un inconnu sur Les Tricotets de Rameau.

Et pour terminer, nous avons vu, justement de Rameau, le manuscrit de La Dauphine.

Sans trop exagérer, il n’est pas facile de décrire l’émotion ressentie quand on se retrouve devant des objets de ce genre, parfois de la main même des plus grands maîtres.

On a noté les cotes de certains manuscrits, dans le but de retourner un jour les compulser plus en détail, de faire peut-être des copies, et, pourquoi pas, des éditions. Enfin, avec regret, nous avons dû quitter ce lieu, avec une profusion de remerciements pour Madame Massip, et le souhait que d’autres puissent aussi avoir la chance énorme que nous avons eue.

Richard Siegel